Pour tenter de nous remettre de la déception de notre premier road trip en Westfalia qui s'est soldé par le plus lamentable des échecs, nous avions prévu nous remonter le moral en allant explorer une contrée pas si lointaine, mais tout de même dépaysante culturellement: l'Ontario!
Nous avions prévu passer deux jours en camping aux Mille-Îles avec mon frère (de plus en plus tatoué, soit dit en passant...) et ma belle-soeur Justine. Au programme: bronzage et baignade à la plage, lecture (pendant que les gars s'amuseraient à faire des sports que nous ne voulons pas faire habituellement avec eux), plongée en apnée, feu de joie, bonne bouffe, alcool et bidonnage en groupe.
Jeudi matin, c'est la course folle pour préparer le Westfalia. Nous partons donc avec une heure de retard sur notre planning ( je tiens à préciser que je ne suis pas responsable de ce honteux manque de ponctualité). Évidemment, comme tous nos voyages commencent par une visite au Canadian Tire, celui-ci ne fait pas exception. Nos masques de plongée ayant simultanément rendu l'âme (coïncidence ou solidarité?), nous nous rendons à Delson pour magasiner un brin avant le vrai départ. Nous en sommes en fait à notre quatrième arrêt à ce moment-là (essence-épicerie-visite-à-Ben-l'ami-d'Etienne-qui-a-aussi-un-Westfalia-et-à-qui-on-doit-livrer-une-pièce) et je commence à être exaspérée, car arriver à l'heure est très important pour moi. Il est déjà 12:30 et nous devions être au camping vers 15:00, ce qui est désormais humainement impossible quand on pilote un Westfalia 1982 qui fait du 100 km/heure uniquement s'il a le vent dans le dos.
Supportant peut-être mal mon attitude positive qui s'exprime depuis le matin sous forme de : "J'espère qu'on ne tombera pas en panne cette fois-ci" , "Est-ce que la van va bien?" , "C'est quoi ce bruit-là?" ," À combien de kilomètres on a droit déjà pour se faire remorquer?" , "J'espère vraiment que tout va bien aller" ou encore "Est-ce que tu es nerveux, toi ?", l'objet de mes craintes refuse de démarrer dans le stationnement du Can. Tire. J'ai alors droit à un regard de mon amoureux-plus-que-jamais-écoeuré-et-qui-est-sur-le-point-de-sauter-une-coche-solide. Et quel regard! Si je voulais le traduire, ça dirait probablement ceci: "T'aurais pas pu te taire avec toutes tes insinuations sur sa fiabilité? Tu l'as choqué là!". S'en suit la valse habituelle: vérification du système d'injection, de la pompe à essence, nettoyage du filtre dont j'oublie toujours le nom, appel au garage pour demander l'avis du mécano, essais infructueux, jurons et coups de pied dans la roue, moi qui demande: "est-ce que je peux faire quelque chose?" lui qui répond :"non", moi qui tourne autour de lui et qui envisage de prendre une collation pour joindre l'utile au désagréable, lui qui tourne autour de la van, nouveaux essais et puis, surprise! Elle repart enfin!! On ne sait pas trop pourquoi, mais on (excluant la personne qui parle) en déduit qu'il refuse de démarrer si le moteur est chaud. Pratique en pleine canicule, hein?
HOURRA! On décolle et nous décidons que nous n'arrêterons plus le moteur jusqu'à ce que nous soyons arrivés. Cette solution nous paraît être un bon compromis, car aucun de nous n'envisage de retourner à la maison. La route est longue pour se rendre au Canada, mais nous parlons peu, trop occupés à écouter le moteur et à angoisser chaque fois qu'on sent une variation étrange, aussi minime soit-elle. Étrangement, nous nous sommes rendus sans encombre.
Nous avons eu beaucoup de plaisir et nous nous sommes vraiment détendus (j'ai lu Le vide de Patrick Sénécal presque en entier). J'ai nagé dans la forêt d'algues avec les petits poissons bleutés et j'ai poursuivi (à distance raisonnable) un brochet d'environ 2 pieds de long. C'était vraiment bien, mais amoureux-aventurier avait besoin de plus d'adrénaline.
Avec mon frère, qu'il qualifiera plus tard de "méga-chochotte", il a élaboré le projet de nager en longeant la côte sous le pont pour les États-Unis pour remonter jusqu'à notre terrain de camping. Les vagues sont très puissantes à cet endroit, les roches semblent coupantes et le fond marin disparait dans une abysse profonde. De quoi me charmer! J'ai eu beau lui dire que c'était idiot et qu'il prenait des risques inutiles, amoureux-apprenti-plongeur est toujours très emballé par les activités dangereuses. Adepte de vélo de montagne et de ski hors piste, il est le premier à faire du "break à bras" sur une route glacée l'hiver, à tenter de flatter tous les animaux sauvages qu'il rencontre et je le soupçonne fortement d'envier les gars de Jackass qui font des trucs aussi malsains que de s'accrocher à une fusée home made projetée au-dessu d'un lac. Ils sont revenus environ 45 minutes plus tard (nous étions folles d'inquiétude). Etienne, tout fier de ses coupures, était prêt à y retourner là-tout-de-suite et mon frère, coupé lui aussi, avait l'air de quelqu'un qui a vu sa vie défiler devant ses yeux! Plus tard, mon apprenti-plongeur me dit que mon frère, n'avait pas eu l'air d'apprécier. Ah oui? On se ressemble peut-être plus que je ne le croyais, car j'aurais sans doute détesté suivre Etienne dans son dangereux périple même si je nage mieux que lui. Amoureux-ravi m'a expliqué qu'il avait vu un long brochet et une loutre (d'où le ravissement) et qu'une carpe, d'une taille non-négligeable, avait foncé vers lui, bouche ouverte, ce qui lui avait un peu foutu la trouille. Ah bon? Moi j'aurais sûrement été très zen dans ce genre de situation!!!!
Nous sommes revenus en un seul morceau (si on ne s'attarde pas à tous les petits bouts de peau que j'ai laissés aux mouches à chevreuil et aux litres de sang versés aux moustiques insatiables de l'Ontario) le Westfalia a bien démarré et on s'est rendu jusqu'à la maison (toujours sans arrêter le moteur et ce, même aux pompes à essence!!!). Emballés, on remet ça la semaine prochaine pour une autre destination (peut-être l'Estrie).
Constats sur les Canadiens:
- Ça parle anglais seulement. Ça prend aussi un paisir fou à étirer les voyelles :"Hiiiiiiiiiiii, hooow aaare youuuuu?".
- C'est d'une courtoisie au volant... Les voitures ARRÊTENT quand elle voit un piéton!?!
- Ça s'habille étrangement. On dirait qu'ils vont jouer au golf en permanence.
- Ça ne parle pas de sexe. Mais qui aurait envie d'en parler avec eux?
- Ça surutilise les bâches en camping. Ils en mettent vraiment partout pour s'assurer qu'aucune goutte de pluie ne les atteindra.
- Ça encourage nos valeureux soldats en Afghanistan en arborant des auto-collants "Support our troups" sur leur véhicule. Ce qui est presque impensable ici semble être la norme là-bas. Le patriotisme n'est désormais plus l'apanage du seul Denzel Washington. À quand le service militaire obligatoire?
- Ça ne paie pas d'impôt provincial! (Ce n'est pas nouveau, mais ça me frustre toujours autant.)
- C'est impossible de trouver des indications claires et/ou lisibles pour aller vers Hull ou Gatineau à partir d' Ottawa.
- Ça fait des enfants et ceux-ci crient continuellement et en anglais qui plus est. Pour un prof en vacances, c'est vraiment le pire!
- Ça doit acheter son alcool dans un Beer store où tout est caché ou dans un Liquor store où tout est si... fantastique! La succursale que j'ai visitée à Ottawa était immense et il y avait des tonnes de sélection de vin à des prix alléchants. J'en suis vraiment impressionnée!
L'expérience fut, somme toute, réussie. J'ai même parlé en anglais avec un Anglais roux! J'ai été séduite par cette belle contrée qu'est le Canada. Qui sait? Peut-être irais-je faire mon voyage de noces à Niagara Falls pour retrouver ce petit parfum de dépaysement dans le "plus beau pays du monde"...
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